Le Métropolitain

La Société d’histoire de Toronto décerne le prix Jean-Baptiste Rousseau au journal Le Métropolitain

Le 21 novembre dernier, la Société d’histoire de Toronto (SHT) remettait au journal Le Métropolitain le prix Jean-Baptiste Rousseau. Cette distinction, attribuée chaque année, vise à souligner les efforts de son récipiendaire dans la préservation et la dynamisation de l’héritage francophone dans la Ville Reine. Le prix porte le nom d’un marchand, interprète et fonctionnaire qui, à la fin du XVIIIe siècle, fut un des premiers à s’établir sur le territoire de ce qui allait devenir un jour la capitale ontarienne.

Denis Poirier et Christiane Beaupré, respectivement éditeur et directrice générale du Métropolitain, étaient présents pour recevoir le prix Jean-Baptiste Rousseau des mains d’Isabelle Montagnier, vice-présidente de la SHT. La plaque rappelle le rôle important joué par les médias d’expression française en milieu minoritaire et souligne à ce propos que « Le Métropolitain informe, sensibilise et joue un grand rôle auprès de la communauté ainsi que dans son développement ».

Danièle Caloz

Le journal couvre depuis longtemps la grande majorité des activités de la SHT et celle-ci ne fait pas exception. En effet, outre la remise de ce prix, la soirée incluait également une conférence de Danièle Caloz, historienne et cofondatrice de l’organisme, sur les perceptions entretenues par les Européens du XIXe siècle sur les Premières Nations. En voici un compte-rendu.

Comme Mme Caloz l’a rappelé d’emblée, la civilisation occidentale a longtemps fantasmé les Autochtones d’Amérique qui leur offraient une perspective pour se comparer. Ainsi, au XVIIIe siècle, des philosophes libéraux vont idéaliser « le bon sauvage » pour critiquer la décadence européenne. Or, cette perception va peu à peu cohabiter avec une autre, plus nuancée, engendrée par les contacts accrus entre les Occidentaux et les Autochtones et notamment par les voyages faits par certains de ces derniers en Europe.

À partir de 1830, des représentants des Premières Nations vont traverser l’Atlantique à des fins surtout diplomatiques et culturelles. Ce n’était pas la première fois : des voyages du genre avaient été faits au cours des siècles précédents. Mais ils se multiplieront dans les années 1800 et seront cette fois réellement médiatisés auprès des masses qui réserveront à ces Autochtones un accueil euphorique.

Qui plus est, la découverte culturelle n’est pas à sens unique : les Autochtones sont aussi curieux de mieux connaître les Occidentaux, qu’ils côtoient déjà en Amérique, et de s’informer des réalités de leur société d’origine. Reçus à la cour de la reine Victoria, ils entendent plaider les droits de leur peuple. Alliés militaires et partenaires commerciaux, ils jouissent d’un certain crédit auprès des décideurs politiques mais leurs tentatives de négocier de nation à nation ne donnent guère de résultats.

D’anecdote en anecdote, Danièle Caloz a brossé le portrait d’une époque où les « Indiens » se produisant en spectacle attiraient des foules énormes en Grande-Bretagne, en France, en Belgique, etc. Photographes et peintres demandaient à les immortaliser et les têtes couronnées étaient avides de les recevoir. Les Autochtones n’étaient pas dupes de la dimension carnavalesque et vaguement dégradante de leurs tournées mais les considéraient malgré tout comme des occasions d’attirer la sympathie de ces peuples avec lesquels ils devaient nouer des relations. D’autres Autochtones, convertis au christianisme, voyageront en Angleterre pour recueillir des fonds afin d’améliorer le sort de leur communauté.

Dans la seconde moitié du XIXe siècle s’installe cependant, dans les consciences, l’image de l’Autochtone confit dans une infériorité morale et socioculturelle et qu’il convient de « civiliser ». La curiosité des premiers temps cède la place au mépris et les Premières Nations sont dépeintes, dans le meilleur des cas, sous des jours simplistes et folkloriques que l’on retrouve, par exemple, dans bon nombre de films westerns. Cette perception perdurera longtemps.

Les temps ont heureusement changé et Danièle Caloz a conclu sa présentation en invitant l’assistance à poursuivre cette transformation en s’intéressant aux Premières Nations pour ce qu’elles sont réellement et non pas pour l’image que les autres ont véhiculée à leur propos.

 

PHOTO (Crédit photo : Ronald Dieleman) : Isabelle Montagnier (à gauche) remet la plaque du prix Jean-Baptiste Rousseau à Christiane Beaupré et Denis Poirier.

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