Le Métropolitain

#JeSuisCharlie

Le soir du 7 janvier, un rassemblement de deuil et d’hommage a eu lieu devant l’édifice où loge le Consulat de France à Toronto, suite à la tuerie qui a frappé la capitale française et le journal satirique français Charlie Hebdo. Parmi les 12 victimes de l’attaque, 4 des plus grands dessinateurs de leur temps : Charb, Cabu, Wolinski et Tignous.

Ils étaient environ 300 personnes, peut-être plus. Essentiellement des Français, émigrés ou expatriés, mais aussi des Canadiens. En silence pendant près d’une heure, ils se sont tenus, épaules contre épaules, à trembler de froid, une bougie à la main. Une bougie ou une affiche qui indiquait les mots « Je suis Charlie », slogan de ralliement international né dans les minutes qui ont suivi l’attaque contre le journal Charlie Hebdo.

Le rassemblement était spontané, né sur les réseaux sociaux, sans vraiment d’organisateur. Il a commencé peu après 18 h. Vers 18 h 45, une minute de silence a eu lieu, conclue par une Marseillaise reprise timidement en chœur. L’émotion était palpable, de même que le besoin de se retrouver, même loin de chez soi, entre personnes concernées et endeuillées.

Charlie Hebdo, pour les Français, c’est plus qu’un journal. C’est la part un peu sombre et folle en chacun de nous, la part anticléricale, anarchiste, créative et impolie. Charlie, c’est le journal que l’on apporte en cours pour embêter ses profs, en réalisant quelques années plus tard qu’ils l’ont sans doute aussi dans leur sac. 

« C’est un peu de notre âme qui nous a été arrachée. Je me sens amputé, ce soir. On m’a pris quelque chose », explique Stanley, Franco-Américain, originaire des Ardennes, la voix tremblante. Venu avec des amis, il a du mal à réaliser ce qui s’est passé le matin même. « Charlie Hebdo, c’est une bande d’emmerdeurs, mais ils font partie de ce qui fait que notre culture est belle », poursuit-il.

Plus loin, Yann est venu en famille, avec son fils. Il tient à la main une des plus célèbres éditions du journal, avec ce dessin représentant Allah, qui se tient les mains en s’écriant « C’est dur d’être aimé par des cons… » À ses côtés, tenant un drapeau français, Fabienne nous confie : « Je crois fondamentalement à la liberté d’expression, et c’est pour cela que je suis là. J’ai grandi avec Charlie, ses dessins dingues, sa créativité. J’admirais leur courage. »

Sur son chapeau à grelot de bouffon, Charles a collé une affiche Je suis Charlie. « J’ai mis un chapeau de bouffon pour rendre hommage aux fous du roi. Pour moi, ce sont des héros. Quand les fous de Dieu tirent sur les fous du roi, c’est qu’on est très loin. » 

William, jeune homme ayant grandi entre Paris et Toronto, a marqué plusieurs slogans sur son t-shirt. Il a peur que cette histoire « salisse les musulmans » et souhaite absolument lutter contre les amalgames. 

En finissant leur sombre tâche, les deux imbéciles cagoulés ont crié qu’ils venaient de venger le prophète Mahomet, et qu’ils avaient tué Charlie. Deux choses sont sûres. Leur prophète ne leur avait rien demandé, et Charlie n’est pas mort. De Paris à Toulouse, de Lyon à Montréal, Rio, New York, Londres, Istanbul, Toronto et tellement d’autres villes, son cœur bat encore, et pour longtemps. 

La crise a semblé se terminer vendredi dernier, quand les deux frères Kouachi et un complice qui avait tué une policière la veille, retranchés avec des otages, respectivement à Dammartin et Porte de Vincennes, ont été abattu par les forces d’élite de la police française. Ils pensaient mourir en martyrs, mais ne sont morts qu’en criminels. Les martyrs, ce sont les dessinateurs, les journalistes, les policiers et quatre otages, dans l’épicerie cascher de la Porte de Vincennes. Des martyrs de la liberté d’expression.

Photo : De nombreux Français et Canadiens expriment leur soutien à Charlie Hebdo à Toronto.

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