Le Métropolitain

Directeur de la photographie : métier de lumière et d’ombre

 Au contraire des metteurs en scène ou des acteurs, il est rare que les journalistes aient à interviewer des directeurs de la photographie. Non pas qu’ils soient particulièrement timides ou qu’ils n’aient que peu d’appétence pour l’exercice de l’interview, mais le métier de directeur de la photographie est un métier relativement inconnu du public. Et c’est un paradoxe.

C’est un paradoxe, parce que le directeur de la photographie est responsable de la lumière, sur un film. Et pourtant, il reste dans l’ombre. Paradoxe surtout, parce que son rôle est central dans un film. C’est lui qui place les caméras, choisit l’éclairage, les décors, met en place les sources de lumières, choisit quand tourner et selon quel angle. 

« Il est difficile de définir ce métier, confie Yves Angelo. C’est un métier mouvant, sans fonctions précises, mais en relation directe avec le réalisateur. C’est le responsable de l’image. »

Yves Angelo était en visite à Toronto pour présenter Mon âme par toi guérie, de François Dupeyron, au Festival du film européen. Un film dans lequel il a tenu ce rôle. Yves Angelo est une sommité, dans le monde des directeurs de la photographie. Il a gagné trois Césars, parmi une multitude de prix et d’honneurs. 

Les directeurs de la photographie ont rarement des styles. Ils doivent s’adapter au réalisateur. Pourtant, leur influence est gigantesque. « Il faut entrer dans l’univers d’un metteur en scène, explique-t-il. Je suis sensible à la lumière, forcément, mais pas nécessairement plus qu’un autre. Je cherche l’inattendu de la lumière. Ce que je ne maîtrise pas. »

Yves Angelo prépare ses films, d’abord en lisant le scénario, les dialogues. Puis, « tout est une question d’échanges réciproques ». Pour le film de F. Dupeyron, la caméra était portée et les prises de vue improvisées. « Il n’y avait aucune marque sur le sol. Je ne savais ce que j’allais filmer, ni comment. Nous n’utilisions que peu de projos, on devait s’adapter aux heures naturelles. Tout le film a été fait comme ça. » Ce qui semble être une contrainte peut très vite devenir un gage de liberté. « La caméra n’est plus le centre du plateau, d’autant que nous n’utilisions ni rail de travelling, ni grue », dit-il.

Parmi la longue, très longue filmographie d’Yves Angelo, il retiendra un téléfilm, qu’il a réalisé pour la chaîne franco-allemande très intellectuelle Arte. Des fleurs pour Algernon. L’histoire d’un simple d’esprit qu’une opération rendra surdoué, avant qu’il ne retombe dans la bêtise, et qu’il ne se tue. « C’est un monologue d’une heure et demie. Un acteur, seul, une caméra. C’est le film pour lequel j’ai eu le plus de plaisir à travailler. C’est un rapport entre une caméra et un œil. Cela résume mon métier », conclut M. Angelo.

Photo : Yves Angelo

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