Le Métropolitain

Des étudiants, parfois méfiants des médias, face à des journalistes de Radio-Canada

Jean-François Gérard

Le public réuni dans l’amphithéâtre de l’Université de l’Ontario français, des étudiants et quelques membres de la communauté francophone, semblait représentatif des Canadiens francophones lorsqu’on l’interroge sur sa confiance envers les médias.

Grâce à un outil interactif, 48 % des participants ont répondu qu’ils avaient plutôt confiance et ont donné une note de 3,1 sur 5 sur le niveau de crédibilité qu’ils leur accordent. Un résultat à peu près conforme à un sondage demandé par Radio-Canada, auquel 47 % des francophones ont répondu faire confiance aux médias. Face à l’estrade, trois journalistes du diffuseur public ont présenté leur manière de travailler et participé à une discussion dans le cadre d’une opération que la chaîne réplique à travers ses stations.

Première à s’exprimer, Sabine dit d’emblée n’a « plus confiance » dans les médias. Nouvelle arrivante, elle regrette que la contestation face « au passé colonial français » en Martinique « reste au niveau de l’île ». Une autre personne pointe l’intense couverture des guerres en Ukraine et à Gaza, mais très faible d’autres conflits comme au Congo.

« On voit passer des chiffres sur les réseaux, cinq millions de morts, mais on n’arrive pas à les confirmer, à trouver la source », répond à ce sujet Nicolas Haddad, qui anime la matinale Y a pas deux matins pareils. Et le média est incapable d’y envoyer des reporters.

La discussion reste courtoise, mais les reporters peuvent mesurer parfois comment la défiance s’installe. « C’est précieux pour nous », lancent à la foule les journalistes, enthousiastes.

Sur une note plus positive, des étudiants disent aussi avoir mesuré la limite des réseaux sociaux et de vidéos « sorties de leur contexte ». « La radio terrestre permet de ne pas être dans une bulle, quand je l’écoute ça fait comme un accident dans ma bulle », défend Nicolas Haddad, raison pour laquelle il dit préférer ce média aux balados.

La fin de la discussion tourne autour de la neutralité et la diversité des points de vue, par exemple la sous-représentation des électeurs de Donald Trump, qui a pourtant remporté le plus de voix lors des élections américaines. Pour la journaliste Katherine Brulotte, il n’est pas possible d’être impartial, mais c’est le rôle des journalistes de lutter contre : « J’ai des biais et si on l’entend, c’est que j’ai raté ma journée. ». Elle raconte qu’en reportage au Michigan pour les élections, les électeurs républicains lui parlaient, mais voulaient rarement être enregistrés. « Il n’y a pas de Républicains au Canada », répondaient-ils, témoigne la journaliste.

Mais il n’y a pas de consensus sur cette question. Un autre participant répond qu’il préfère « un point de vue tranché » et assumé, comme c’est parfois davantage le cas dans les médias américains, que de se cacher derrière une fausse neutralité.

À l’issue de cet échange, Hela Zahar, responsable du Pôle d’études et de recherche en cultures numérique à l’UOF dit remarquer la défiance chez les étudiants, mais que ces événements contribuent à rétablir un peu de liens. « Ça aide énormément, ils ont lu des choses, ils rencontrent des journalistes… C’est notre démarche, car si on a juste la littérature, ça ne veut pas dire que tout y est bon », conclut-elle.

Photo : De gauche à droite : Philippe de Montigny, Katherine Brulotte et Nicolas Haddad

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