Chrismène Dorme

À l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination des violences à l’égard des femmes, l’Alliance française de Toronto a proposé, le samedi 22 novembre, une projection du film Slalom, suivie d’une discussion menée par des spécialistes engagées dans la protection et l’accompagnement des victimes.

Présentée au Théâtre Spadina, la session a rassemblé un public varié, profondément touché par ce drame qui explore les mécanismes d’emprise et de silence dans le milieu sportif, en partenariat avec Oasis Centre des femmes et soutenu par l’Institut français du ministère de la Culture.

Premier long métrage de Charlène Favier et sélectionné au Festival de Cannes 2020, Slalom retrace le destin de Lyz, 15 ans, élève de la section ski-études de Bourg-Saint-Maurice, placée sous la tutelle — puis sous la domination — de son entraîneur Fred. Le drame interroge avec force les dérives liées au pouvoir et à l’autorité, portées par une mise en scène d’une grande précision visuelle et émotionnelle.

Pour Cynthia-Laure Etom, directrice culturelle de l’Alliance française, présenter ce chef-d’œuvre à cette date symbolique s’est imposé comme une évidence : « Il nous fallait une œuvre en prise directe avec les enjeux de cette journée. Slalom aborde avec une rare justesse l’emprise et les violences sexuelles sur les mineurs. La réalisatrice puise dans sa propre histoire, ce qui confère au film une authenticité particulière. »

Elle rappelle également que le récit dépasse largement le cadre du sport, : « Le film parle de performance et d’ambition, mais aussi de thèmes universels comme la trahison de la confiance ou la solitude. Il amène à se demander : comment repérer une situation d’emprise? Pourquoi la parole est-elle si difficile à libérer? Ou encore comment protéger les jeunes? ».

Après la projection, trois expertes — Aline Nizigama, directrice générale du Young Women’s Christian Association Canada (YWCA), Khedidja Hmamad, psychothérapeute agréée et Maryamou Dièye, travailleuse sociale — ont apporté un éclairage complémentaire sur les dynamiques de domination et les obstacles rencontrés par les victimes.

« Leur présence permettait d’aller au-delà de ce que montre le film, d’expliquer les mécanismes à l’œuvre et de fournir des outils concrets pour identifier les signaux d’alerte », commente Cynthia-Laure Etom.

L’émotion était palpable dans la salle, les spectateurs ont partagé des réactions particulièrement fortes. « Beaucoup sont venus parce qu’ils se sentaient concernés, parfois en raison de leur propre histoire », ajoute-t-elle.

Pour la directrice culturelle, le rôle du cinéma dans la lutte contre les violences faites aux femmes est essentiel : « La culture permet de sensibiliser, d’ouvrir des discussions et de créer un espace pour aborder ces questions. »

Selon elle, Slalom a parfaitement rempli cet objectif : « Le film permet de voir, de comprendre et de ressentir. C’est exactement ce qui s’est passé : il a encouragé chacun à réfléchir autrement. Il ne désigne pas de coupable, il montre une situation réelle. Et si cela ouvre des conversations essentielles, comme celle de notre rencontre, alors c’est déjà un pas vers la libération de la parole — les victimes ne sont jamais responsables », conclut Cynthia-Laure Etom.

Photo (Crédit : AFT) : De gauche à droite : Cynthia-Laure Etom et les panélistes Aline Nizigama, Khedidja Hmamad et Maryamou Dieye