Le Métropolitain

L’hymne à la femme de Patricia Cano

Son titre Juana Guerrière attire l’attention dès les premiers mots, les premières notes. La voix douce et sensuelle, tel un chuchotement enveloppant, Patricia Cano conte l’histoire d’une jeune femme noire qui s’éprend d’un homme blanc en 1920 qui lui promet le mariage, en omettant un petit détail : il est déjà marié!

Ce thème de la femme, la chanteuse canado-péruvienne l’étire, le décline, l’embrasse dans son nouvel album, Madre Amiga Hermana, avec une force tranquille et ce timbre suave qu’on lui connaît. Exquis.

La Torontoise joue avec les émotions comme elle jongle avec les cultures. Elle réussit, à travers ses 11 titres, le mariage parfait entre la bossa nova, la féminité et les langues du monde. Un alliage harmonieux qui égrène les thèmes de l’amour, de la maternité, de la race ou encore de l’environnement, tantôt en français, en espagnol, en anglais et dans la langue péruvienne de ses parents, le quechua, avec ce titre lumineux : Terre-Mère.

Face à certaines critiques sur le manque de cohérence de son premier album, également multilingue, Patricia Cano a décidé de rester elle-même : « Chanter dans plusieurs langues n’est pas du goût de tout le monde. Des opinions par moment très fortes ont eu pour effet de me bloquer par le passé. Aujourd’hui, je ne me pose plus de question. Je chante ce que je suis. Je vis et me représente dans les trois langues. Je m’exprime comme je le sens. C’est la musique qui décide. »

Elle perçoit le français comme une richesse, «  une ouverture en moi qui existe depuis toujours. Je l’ai cultivé à l’école à Sudbury mais aussi au Théâtre du Soleil à Paris, où j’ai travaillé durant quatre années extraordinaires. »

Sa prose multilingue et multiculturelle épouse des rythmes afro-péruviens – identifiables au son du cajón, une caisse de résonnance traditionnelle du Pérou – et latino qui renouvellent continuellement l’univers jazzy, mis en relief par le guitariste Kevin Barett, le bassiste Paco Luviano et le talentueux Carlos Bernardo, avec qui la chanteuse a co-écrit l’album.

Cette collaboration fructueuse lui avait permis de remporter, en 2011, le prix du Meilleur album par un artiste solo au Prix de musique et de film du Nord de l’Ontario pour son premier albumThis is the New World (2009). Continuer avec lui était tout simplement une évidence. « Carlos est un génie de la composition. Il a apporté de la maturité à mes textes, enrichi mes mélodies pour les rendre mille fois plus intéressantes. »

Le musicien fait partie de ces rencontres qui ont influencé de façon décisive la trajectoire de l’auteure-compositeure-interprète, au même titre que l’écrivain cri Tomson Highway. « Tomson a apporté la musique dans ma vie et m’a permis de chanter partout dans le monde. » Sa performance dans The (Post) Mistress lui a d’ailleurs valu cette année le prix de Meilleure actrice dans une comédie musicale aux Toronto Theatre Critics Awards.

Produit par le percussionniste Luis Orbegoso, ce deuxième opus marque un retour attendu du public torontois qui aura la primeur d’un concert cet automne, le mercredi 4 octobre, au Lula Lounge. « Après tout ce temps consacré aux tournées théâtrales, tout le monde patientait depuis un moment et j’ai hâte de partager ça avec mes fans, ma famille, mes musiciens… »

Photo : Patricia Cano lance son deuxième album à Toronto.

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