Le Métropolitain

50 ans de révolution cubaine vus par Aurélien Muller

Parvenir à trouver les mots pour décrire l’exception cubaine, son histoire et ses légendes n’est pas chose aisée, tant les avis divergent. Quand prendre la parole ne suffit plus, il reste l’image et toute la poésie des angles qui vient avec. Le photographe franco-suisse Aurélien Muller s’y est essayé et de cette initiative est née l’exposition Cuba : 50 ans de révolution, dont le vernissage a eu lieu le mercredi 8 avril.

C’est une cinquantaine de clichés en noir et blanc qui sont venus orner les murs de la galerie de l’Alliance française de Toronto devant un public nombreux, comptant autant de Canadiens que de Français et de Cubains. « Cette exposition ne consiste pas à montrer ce que des millions de touristes canadiens voient chaque année, dit M. Muller, mais plutôt à voir ce que nous pouvons apprendre de Cuba. » Visages expressifs, paysages au parfum de communisme, cours d’écoles… toute une série d’endroits choisis pour leur portée symbolique. Le changement progressif de l’environnement de l’île est également au cœur de l’exposition, car l’artiste s’y rend tous les ans depuis 2010 pour explorer divers recoins et contempler les évolutions.

Pour l’occasion, le consul général de Cuba à Toronto, Javier Dómokos Ruiz, avait fait le déplacement afin de rendre hommage à la bonne entente entre son pays et le Canada depuis de nombreuses années, sans que la Guerre froide ne soit venue troubler cette complicité. L’amélioration des rapports avec les États-Unis est bien entendu évoquée sans toutefois que cela ne soit sujet à un hommage exagéré : « La presse en dit plus que ce qui se passera réellement entre les États-Unis et Cuba », plaisante le représentant avec un soupçon de cynisme.

La description des œuvres affichées passe par l’inévitable promotion du régime sur les routes de la capitale : « Avant, c’étaient des panneaux de propagande et maintenant, ce sont des panneaux pour le tourisme entre l’aéroport et La Havane », explique Aurélien Muller. Les premiers visages se crispent. Tandis qu’il poursuit sa description du système politique et social cubain en en pointant les avantages et désavantages, sans pour autant ménager les pays capitalistes voisins, l’atmosphère semble s’électriser quelque peu. Ses propos sont honnêtes et empreints de sincérité, mais la diplomatie requise en présence d’un officiel d’un pays ami fait peut-être légèrement défaut. Sur la défensive, le consul général poursuit avec une longue tirade énonçant les qualités de la politique en place en misant principalement sur le système de santé : « Nous avons l’un des meilleurs systèmes de santé au monde. Nos hôpitaux ne sont peut-être pas luxueux mais ils sont humains. » Sentant l’atmosphère s’alourdir, Aurélien Muller a rappelé ses motivations premières : faire la promotion des atouts de Cuba, sans arrière-pensées. Un épisode aussi intéressant que l’exposition en elle-même, qui montre bien qu’il existe encore quelques résistances et incompréhensions entre les différents partenaires. Celles-ci sont à l’évidence amenées à disparaître au fur à mesure des échanges et du dialogue.

Les travaux du photographe n’en restent pas moins de grande qualité et chaque cliché raconte sa propre histoire, capte un instant de la vie cubaine, captive et interroge. Reconnu pour son exposition sur l’exil des Tibétains présentée en 2012, il poursuit sur sa lancée en proposant des thèmes atypiques et audacieux.

Présentée jusqu’au 2 mai, l’exposition Cuba : 50 ans de révolution sera ensuite offerte au public cubain au mois de juin, à l’Alliance française de La Havane.

Photo: De gauche à droite : le consul général de Cuba à Toronto, Javier Dómokos Ruiz, le photographe Aurélien Muller, et Thierry Lasserre de l’Alliance française.

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